Posté par Yann Essabe, le 30 avril 2024
L’ambitieux programme agricole « Graine », lancé par le pouvoir déchu, en 2014, en partenariat avec Olam International, pour stimuler la production agricole au Gabon, a finalement pris de l’eau. Le constat de cet échec patent a été fait par le Président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, à la ferme agropastorale de Ntoum, il y a quelques jours.
Par Yann Essabe
C’est à un spectacle lunaire auquel a eu droit le chef de l’État, Brice Clotaire Oligui Nguema, qu’accompagnaient le Premier ministre et certains membres du gouvernement, en arrivant sur la ferme agropastorale de Ntoum, sur la route de Donguila, à un jet de pierre de Libreville.Tout était figé, la nature ayant repris ses droits face à l’incapacité de l’homme de la dompter.
Bulls, tracteurs, Caterpillars, motos-bennes, chambres froides, camions frigorifiques, serres, étangs de poisson, bâtiments administratifs, etc.
C’est la Banque mondiale (BM) qui nous édifie sur les raisons de la bérézina honteuse dans son rapport intitulé « Note de conjoncture économique du Gabon », publié en 2022. Elle cite : la faible population rurale (15% de la population gabonaise), le désintérêt des jeunes pour l’agriculture et le coût très élevé de la main d’œuvre, un système foncier inadapté et, enfin, le conflit homme-faune qui s’est posé dans certaines provinces. Mais pas que.
Si les objectifs de "Graine" étaient nobles, notamment augmenter la contribution du secteur agricole au PIB de 20 % et réduire de 50 % les importations de produits agricoles de base, son implémentation a fait face à d’autres écueils sur deux leviers essentiels de ce projet : la création des coopératives agroalimentaires et leurs préfinancements.
Selon cette note de conjoncture, plus de quinze mille petits exploitants étaient concernés et huit cents coopératives devaient exploiter 7 000 ha de terres aménagées. Sauf que dans les faits, plus de la moitié étaient fictifs mais ont néanmoins bénéficié des préfinancements.
Avait-on gonflé sciemment les chiffres pour augmenter la capacité d’investissement des bailleurs de fonds ? Possible. Les villages, d’où devaient provenir les premières récoltes, ont une main d’œuvre vieillissante. Les populations ayant préféré les villes où se concentrent 75% de la population générale, dont 60% de jeunes. Cette méconnaissance des réalités socio- économiques et anthropologiques locales, dans la mise en œuvre de ce projet de souveraineté, a été un facteur aggravant de l’échec. Conséquence : les productions de la première phase (2014-2018) ont fait florès. Tout au moins, leurs objectifs à grande échelle.
Malgré cela, une restructuration de "Graine" a été initiée avec l’appui de la Banque africaine de développement (BAD, soit huit cent millions de francs CFA, et un prêt de 1, 2 milliard de francs CFA accordé par la Banque mondiale (BM) et à la Société gabonaise de transformation agricole et développement rural (SOTRADER) pour la deuxième phase du programme.
Seules les coopératives constituées à majorité de femmes qui existaient avant le projet dans les provinces de l’Estuaire, du Haut-Ogooué, du Woleu-Ntem, de la Ngounié et de la Nyanga, ont su répondre, à minima, aux attentes de la SOTRADER. Bien d’entre elles avaient déjà entamé l’étape de la transformation des produits agricoles mais à une petite échelle par manque de soutien pour la phase industrielle. Les autres, sais pied d’agriculteur ni profil de manager dans le domaine, n’ont pas eu le même impact, malgré leur prise en main par la SOTRADER.
Cet échec confirme-t-il l’opinion selon laquelle, le Gabonais n‘a pas le pied d’agriculteur ? On est tenté de le croire. Toutefois, si le gouvernement de la Transition a décidé de reprendre en main la ferme agropastorale de Ntoum, un audit est cependant nécessaire pour comprendre comment 9, 5 milliards de francs CFA ont été engloutis dans un projet porteur sans atteindre les objectifs escomptés ?
Retour à la liste
30/04/2024 à 07:50
127
{{rdo.ann_fav[311525] ? 'Sortir de' : 'Dans'}} mes favoris
Akanda
Voir ses autres annonces
Lui envoyer un email
Connectez-vous pour contacter l'annonceur en instantané